L'intervieweur

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Voilà vingt-cinq ans qu'Alain Veinstein hante les studios de radio, vingt-cinq ans qu'il se retrouve devant un micro, pose des questions à un invité, interpelle, interroge. Avec L'Intervieweur, il livre donc une partie de son métier. "Je me contente d'écrire ce qui me passe par la tête des bouts de phrases sur des bouts de papier." D'où un déroulement narratif présenté en séquences courtes. Devant lui et son micro passent une poétesse crue et vulgaire, un interlocuteur qui respire à grands coups, des promoteurs de leurs belles œuvres, des intarissables, des contents d'eux, des timides, cependant qu'un technicien s'esclaffe, roule une cigarette, et qu'une attachée de presse laisse flotter au-dessus d'elle les fragrances d'un sensuel parfum. Ce sont là autant de moments volés à l'enregistrement, rapportés pendant et hors antenne, qui témoignent d'un sens de l'observation aiguisé. À tel point qu'on se demande si l'auteur narrateur intervieweur reste attentif aux questions qu'il pose ! On l'aura compris, en livrant une partie de son travail, en disant les choses sans les dire, taisant les noms, masquant les invités, Alain Veinstein en dit autant sur lui-même que sur un métier "public". L'Intervieweur pourrait se lire comme une longue plainte, un moi et un je étendus sur plus de trois cents pages. C'est surtout le livre d'un homme parfois déçu, parfois amer, désabusé, parfois heureux aussi, qui vit simplement tout ce qui sort et ressort d'une rencontre de quelques minutes et de quelques heures. Tout cela n'est évidemment pas une œuvre littéraire. Quand bien même L'Intervieweur porte en sous-titre le nom de roman. Il s'agirait plutôt d'un témoignage, avec ses parts de réels et d'irréels, qui pourraient en fin de compte n'intéresser que des auditeurs déjà conquis. --Céline Darner